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Les vraies solutions pour le climat sont féministes

“Le changement climatique est un problème causé par l’homme qui a une solution féministe” – Mary Robinson 

A l’occasion de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes, je voulais vous partager un peu de mon point de vue sur le lien entre solutions pour le climat et féminisme.

L’un des principes qui me permet de tenir bon au quotidien dans cette lutte contre la crise climatique est la ferme conviction que si nous réussissons, non seulement nous limiterons les effets du changement climatique et la destruction de notre environnement, mais nous pourrons aussi résoudre de multiples fléaux sociaux. Si nous nous penchons vraiment sur les racines du changement climatique, nous constatons que ses causes destructrices sont tissées de tant de forces toxiques.

92,6 % des PDG de Fortune 500 sont des hommes. Les hommes détiennent encore 75 % des sièges dans les parlements nationaux du monde entier. Sur les 110 dirigeants de la COP27 qui a eu lieu en novembre 2021, seulement sept étaient des femmes. Depuis 1970, les émissions mondiales de carbone ont augmenté d’environ 90 %. Si nous examinons les solutions nécessaires pour sauver notre planète, nous devons cesser de nous appuyer sur des systèmes patriarcaux et néocoloniaux qui ne cherchent qu’à mettre en œuvre des artifices qui leur permettent de perpétuer leur mainmise sur le pouvoir.

La façon dont ces systèmes destructeurs s’accaparent nos ressources naturelles est très similaire à la façon dont nos sociétés patriarcales traitent les femmes.

Il y a des années, Vandana Shiva et Maria Mies, dans leur texte clé Ecofeminism, ont clairement déclaré que “partout où les femmes ont agi contre la destruction écologique… elles ont immédiatement pris conscience du lien entre la violence patriarcale à l’égard des femmes, des autres groupes minorisés et de la nature”.

Les Lumières occidentales ont appris aux hommes à considérer l’environnement comme un “autre”, de la même manière que les femmes ou les personnes de couleur l’ont également été et le sont toujours. En les qualifiant de “autre”, il était alors plus acceptable de les maltraiter. Mais ce système n’a que trop duré ! Si nous voulons aller de l’avant, nous devons bouleverser ce mode de pensée obsolète et meurtrier.

Journée internationale de lutte pour les droits des femmes : lutte contre les énergies fossiles

La Dr Valerie Hudson fait partie des personnes qui ont développé le projet WomanStats qui, grâce à des recherches rigoureuses, a montré qu’il existe une corrélation directe entre le degré de paix d’une nation et la manière dont elle traite ses femmes. Les données ont clairement montré que “ce qui arrive aux femmes affecte la sécurité, la stabilité, la prospérité, le caractère belliqueux, la corruption, la santé, le type de régime et (oui) le pouvoir de l’État”. Il n’est pas difficile d’établir des liens entre le traitement des femmes et celui de l’environnement. Je parierais qu’il est fort probable que les pays dont les politiques de protection des femmes sont exécrables respectent également peu les engagements pris en matière de climat. Bien que, avouons-le, ceux considérés comme étant avancés en matière d’égalité des genres ne sont pas non plus exempts de ces manquements.

Il a été répété à maintes reprises que les femmes portent le poids le plus lourd du dérèglement climatique. Les Nations unies estiment que 80 % des personnes déplacées par le changement climatique sont des femmes. Les faits ne s’arrêtent pas là. Elles sont les plus exposées lors des catastrophes climatiques, perdent leurs revenus et sont confrontées à des taux de violence plus élevés. Je recommande la lecture de cet article de ma collègue Natalia Cardona, intitulé “La lutte pour l’égalité des genres participe à la lutte pour la justice climatique”, dans lequel elle déclare : “Pour moi, en tant que femme de couleur, les luttes pour protéger l’eau, la nourriture et la terre contre l’industrie des combustibles fossiles sont des luttes pour les droits des femmes et des filles. Ces luttes sont liées à nos appels à l’autonomie sur nos corps, nos vies, nos moyens de subsistance et notre droit à vivre sans violence.”

Mais les femmes sont également à l’avant-garde de la mise en place de solutions pour le climat – des solutions réelles, durables et profondes. Les femmes arrachent les racines systématiques pleines de pourriture et aident à planter de nouvelles visions et voies à suivre. Pour ce faire, nous avons besoin d’un féminisme intersectionnel qui reconnaisse les liens nécessaires entre les luttes. Dans un essai récent et puissant (en anglais), le Dr Chelsea Mikael Frazier déclare : “La pensée écologique féministe noire a toujours murmuré pour nous, nous incitant à comprendre les points interconnectés de notre société malade comme une première étape vers la restauration de nos environnements”. Le racisme, le colonialisme, le patriarcat et la crise climatique sont profondément liés, ce qui signifie que nos solutions doivent l’être également.

Bangkok, Thailand — Sept 8, 2018. Photo by Pongsit Nopmaneepaisan l Survival Media Agency

 

Il n’existe pas de principes féministes immuables, mais au-delà des croyances en l’égalité des sexes, il existe des conceptions fondamentales concernant la valorisation de la coopération, de la diversité et de l’importance des soins.

Nous pouvons nous inspirer de femmes comme Angela Davis, Fatima Ouassak, Ines Leonarduzzi, Melina Laboucan-Massimo et Eriel Tchekwie Deranger d’Indigenous Climate Action. Toutes ces femmes travaillent sans relâche pour protéger leurs communautés de la dévastation causée par les grandes entreprises et les systèmes capitalistes et patriarcaux. Ines lutte activement dans son travail pour diminuer l’impact écologique du numérique. Melina et Eriel, avec tant d’autres, ont également travaillé sur la question des femmes autochtones assassinées et disparues, qui a été si horriblement répandue. En outre, Melina Laboucan-Massimo a contribué à la création de Sacred Earth Solar, qui fournit des solutions d’énergie renouvelable aux communautés autochtones.

Lorsque Souba Manoharane-Brunel s’approche d’un microphone, je l’écoute attentivement. Elle est quelqu’un qui réfléchit en profondeur et présente ses vérités et sa sagesse de manière intersectionnelle. Elle a co-créé Les Impactrices, une organisation locale qui “lutte pour la justice climatique, de genre et la divsersité” – en particulier en accompagnant les femmes, les femmes racisées et les groupes minorisés dans les luttes pour la justice climatique”. Les initiatives pour amener des solutions à la crise climatique et pour éduquer le grand nombre aux enjeux du changement climatique existent et se multiplient de plus en plus, souvent portées par des femmes extraordinaires.

Toutes nos luttes sont liées. Il ne tient qu’à nous de se saisir de cette réalité pour créer un front large et unis pour un avenir juste et propre pour tous·tes.

De gauche à droite : Marie Toussaint (eurodéputée); Stacy Algrain (activiste climat); Vanessa Nakate (activiste climat, membre de la délégation ougandaise stopEACOP); Léa Kulinowski (les Amis de la Terre); Hilda Flavia Nakabuye (activiste climat, membre de la délégation ougandaise stopEACOP)

Il y a tant de femmes qui font humblement un travail incroyable pour protéger leurs communautés et construire de nouvelles réalités. Il y a des femmes que vous ne verrez jamais dans un article sur le “top 10 des leaders climatiques”, mais qui font le travail pour créer les structures d’organisation nécessaires jour après jour. Et le plus souvent, elles ne le font pas seules, mais avec une cohorte de sœurs, de tantes, de collègues et d’amies qui les soutiennent. Elles protègent leurs terres de l’empiètement continu des industries extractives. Elles se battent pour leurs droits. Elles prodiguent des soins à ceux qui en ont le plus besoin.

Lorsque nous disons que l’avenir est féministe, j’espère qu’il s’agit d’un avenir où nous honorons nos relations plus que nous ne vénérons les marchandises. Je veux un avenir où les femmes auront l’autonomie de leur corps et où les communautés indigènes auront le contrôle de leurs terres. Une réalité vécue où la sagesse de nos grands-mères et de nos mères est honorée et respectée. Un présent riche d’une diversité de langues, de semences et de façons d’être. Un espace où nos protestations sont respectées et où nous avons la liberté de développer des modes de connexion plus sains.


Vous pouvez écouter Vandana Shiva, Eriel Deranger et Noelene Nabulivou lors de leurs précieuses interventions au cours du Global Just Recovery Gathering organisé en 2021 par 350.org (en anglais) ainsi que d’autres femmes militantes, dont Fatima Ouassak dans leurs prises de parole sur les liens entre climat, genre et lutte pour l’avenir de nos enfants (en français) :

 

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